Historique du 107e Régiment d'Infanterie
Jean Henri Labajauderie en uniforme du 107e Régiment d’Infanterie
- insigne de tireur de première classe (cor de chasse) cousu sur le bras gauche -
[photo du studio A. de la Fregonnière, 6 place du Mûrier à Angoulême
(en 1946, cette place a été renommée place Francis Louvel, du nom d'un résistant
originaire de Cognac fusillé dans la forêt de la Braconne le 15 juillet 1944)]
Selon la fiche matricule de Jean Henri Labajauderie [N°818, bureau de recrutement de Magnac-Laval, classe 1908, Archives départementales de la Haute-Vienne : cote 1 R 697], il a été au 107e R.I. du 3 août 1914 au 9 juillet 1915, date de son passage au 162e R.I..
Le 107e Régiment d’Infanterie, basé à Angoulême, en est parti pour le front le 6 août 1914. On peut donc supposer que Jean Henri Labajauderie a été transporté de Magnac-Laval à Angoulême entre le 3 août et le 6 août 1914.
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Le 6 août 1914, Jean Henri Labajauderie part aux armées.
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L’historique réglementaire du 107e R.I. décrit ainsi le début de la guerre :
"C’est le 6 août 1914 que le régiment quitta la ville d’Angoulême, au milieu des fleurs et des ovations enthousiastes.
Après avoir passé une vingtaine de jours en Argonne, puis près de la frontière belge, il fût engagé en Belgique, où il reçut le baptême du feu le 21 août à Isel, et le 22 à Grapfontaine (région de Neufchâteau). C’est là que tomba le capitaine Fouquet, le premier des officiers du 107e R. I. qui eut l’honneur de verser son sang pour la France.
Le régiment prit part à la retraite de Belgique, où il offrit à plusieurs reprises une résistance acharnée. Les ordres de repli successifs, provoqués par la situation générale, causèrent à chaque fois au 107e R. I. une déception ; car l’ennemi qu’il avait en face de lui avait toujours cédé le terrain en fin de journée et n’avait jamais songé à la poursuite."
Le Journal des Marches et Opérations du 107e R.I. donne quant à lui une idée précise des pertes infligées à ce régiment entre août 1914 et juin 1915.
Le 22 août 1914 à Menugoutte (Belgique), le total des pertes (tués et blessés) s’élève à 82.
Le 28 août 1914 à Létanne (au sud-est de Sedan, sur la Meuse, Ardennes) : 35 tués, 253 blessés, 6 disparus, 1 cheval tué.
Le 28 août 1914, Eugène Demaille est fait prisonnier à Sailly.
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On peut supposer qu’il s’agit du village de Sailly dans le département des Ardennes, au sud-est de Sedan, à une centaine de kilomètres à l’est-nord-est de Reims. En effet, l’historique du 107e R.I. mentionne Létanne, à une quinzaine de kilomètres au sud-ouest de Sailly, sur l’autre rive de la Meuse, à côté de Beaumont-en-Argonne :
"BEAUMONT
Le premier bond de cette retraite nous conduisit sur la Meuse à Beaumont. Après deux jours employés à fortifier la position par des tranchées exécutées d’une main encore peu expérimentée, le régiment fut porté, en entier, en formation de combat largement ouverte, sur le Bois de l’Hospice, à l’abri duquel l’ennemi avait forcé la Meuse.
Les 2e et 3e bataillons sont engagés d’abord. Comme au temps jadis, le commandant Michel parcourait à cheval sa ligne de combat pour en vérifier l’assiette et la solidité, sans souci des balles qui sifflaient autour de lui, car il fallait « montrer à ces jeunes gens qu’ils ne doivent pas avoir peur ». Sa témérité ne fut pas de longue durée, il tomba bientôt pour e plus se relever. Son successeur, le capitaine Campagne, lui fit rendre les honneurs sur le terrain même par les groupes de soldats qui passaient à proximité, hommage émotionnant en cette circonstance à leur vénéré chef. Mais bientôt après une grêle de balles et d’obus s’abattit sur le régiment : de nombreux officiers et soldats des trois bataillons restèrent sur le terrain.
Le 2e bataillon fut spécialement éprouvé, l’ennemi l’ayant laissé approcher sans tirer jusqu’à 400 mètres du bois. Les officiers, à ce moment-là, avaient encore une tenue toute différente de celle de la troupe ; ils étaient particulièrement visés et suivis par des tireurs spéciaux. Puis, beaucoup avaient la fierté de ne pas courber la tête, ne voulant pas abdiquer l’honneur d’être visés : tel le lieutenant de la Dure, resté debout derrière sa section, la pipe à la bouche, et qui fut tué dans cet acte de témérité. Il fallut des ordres fermes du commandement pour les obliger à se confondre avec la troupe, sinon c’eut été le désastre d’une infanterie sans chefs.
Cependant, le soir de cette journée du 28 août, nous étions maîtres du terrain, et bien qu’un tir d’artillerie lourde, guidé par de mystérieux signaux lumineux, nous eut encerclé de toutes parts, nous nous installions à Léthane, en cantonnement d’avant-poste et en tranquillité suffisante."
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[Le 31 août 1914 dans le secteur des Alleux sur l’Aisne (à l’est de Rethel, Ardennes): 30 tués, 287 blessés, 45 disparus, 5 prisonniers. "Les différentes unités du Régiment, très désorganisées, effectuent leur retraite" sur Bally et Vaudy, au nord de Vouziers sur l’Aisne]
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L’historique du 107e R.I. est intéressant car il décrit la désorganisation de l’armée française en septembre 1914. On y apprend qu’il a été présent sur les lieux aussi fréquentés par le 138e R. I., et qu’il a partiellement fusionné avec ce dernier :
"Un troisième bond nous mena le 2 septembre sur la Butte de Souain. Le régiment avait gagné cette position après une marche continue de 8 heures du soir à midi. Il ne fut pas attaqué. Tous étaient harassés par cette suite ininterrompue de marches et de combats ; néanmoins, la retraite continuait en ordre vers Suippes et Vitry.
Le 1er bataillon formait l’extrême arrière-garde du corps d’armée. Laissée près de la Cheppe en soutien d’artillerie, la moitié de ce bataillon se trouva coupée du régiment dans la nuit du 3 au 4. Il s’y joignit une fraction du 138e R. I., également isolée, et une centaine d’hommes de tous régiments. Le capitaine de Beaucorps qui avait pris le commandement de ce détachement de 12 officiers et de 800 hommes, chercha vainement à rejoindre le Corps d’Armée dont les colonnes ennemies, en marche vers le sud, le séparaient. Ce n’est qu’à Mailly qu’il put connaître l’emplacement exact du XIIe Corps ; et il rejoignit, en pleine bataille de la Marne, le régiment déjà fort éprouvé et où ce renfort fut un appoint très apprécié."
(…)
[Le 6 septembre 1914 à Châtelraould-Saint-Louvent (au sud de Vitry-le-François et de la Marne, département de la Marne) : 28 tués, 60 blessés, 7 disparus.
Le 8 septembre 1914 entre Vitry-le-François et le camp de Mailly (Marne) : 33 tués, 190 blessés, 28 disparus.
Le 9 septembre 1914 dans le même secteur : 9 tués, 23 blessés.
Le 18 septembre 1914 à Perthes-lès-Hurlus (Marne) : 12 tués, 74 blessés, 15 disparus.]
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Historique réglementaire du 107e R. I. :
"Le 11 au matin, l’activité du feu de l’ennemi se ralentit. A l’aube, le talus du chemin de fer est encore occupé ; deux heures après, il n’y a plus personne : toute la ligne s’ébranle. Les ruines fumantes de Courdemanges et Huiron [au sud de Vitry-le-François] sont définitivement dépassées. Pendant quatre jours de poursuite, parcourant 80 kilomètres, nous ne rencontrons aucune résistance. Mais les Boches ont eu le temps de choisir leurs positions : ils y sont déjà solides et nous n’avons plus d’artillerie pour les en culbuter.
REIMS
Après quelques petits engagements, notamment à Perthes, épuisé par des efforts aussi répétés, et par la dysenterie, le régiment est envoyé à Reims, en réserve.
Dès le lendemain de son arrivée, 23 septembre, il est à une place d’honneur, la protection de la lisière nord-est de la ville contre un retour possible de l’ennemi. Cette situation, dite en réserve, comporta quelques engagements et surtout de copieux bombardements, notamment pour le deuxième bataillon à Bétheny (bataillon Magord).
[Bétheny se situe à une dizaine de kilomètres au nord-ouest du fort de la Pompelle]
Le 23 septembre, après avoir recueilli les débris d’un autre régiment, ce bataillon recevant l’ordre de se replier, exécuta le mouvement par groupes de quatre, au pas cadencé, l’arme sur l’épaule droite, faisant l’admiration du commandant de la brigade.
Au bout de huit jours, toute trace de dysenterie avait disparu, nos hommes ayant pu enfin avoir une nourriture abondante et appropriée, et le 107e R. I. était envoyé le 1er octobre tenir un secteur près de Jonchery."
[il s’agit probablement de Jonchery-sur-Suippe, au nord-ouest de Suippes, près de Souain-Perthes-lès-Hurlus]
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Le 23 septembre 1914, Simon Mathias est porté disparu à la Pompelle [Voir l'Historique du 138e R.I.].
Le 24 septembre 1914, Jean Mathias est blessé au combat de la Pompelle [Voir l'Historique du 21e R.I.].
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[Le 23 septembre 1914 à Courcy, le Bétheny et Le Linguet (nord et nord-est de Reims, Marne) : 5 tués, 56 blessés.
Le 24 septembre 1914 à Cernay-lès-Reims (à l’est de Reims, une dizaine de kilomètres au nord du fort de la Pompelle) : 8 tués, 16 blessés. Le 25 septembre 1914 au massif de Berru (est de Reims) : 7 blessés. Le 26 septembre 1914, le 107e R.I. est toujours dans le même secteur, ainsi qu’à Saint-Léonard et Taissy sur la Vesle, à côté du fort de la Pompelle : 4 tués, 13 blessés, 2 disparus. Le 27 septembre 1914 dans les mêmes secteurs : 4 tués, 32 blessés. Le 29 septembre 1914, un bataillon du 107e R.I. reçoit un ordre de relève entre Saint-Léonard et le fort de la Pompelle.
Le 30 septembre 1914 entre Le Linguet et Cernay-lès-Reims : 12 tués, 43 blessés.]
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Début octobre 1914, le 107e R.I. est renvoyé quasiment au même endroit que mi-septembre, dans le secteur de Saint-Hilaire-le-Grand, Jonchery-sur-Suippe, Suippes et la Ferme de Suippes (Marne), aux côtés notamment du 138e R.I.. (selon le J.M.O. : 12 octobre : 13 tués, 38 blessés / 13 octobre : 4 tués, 16 blessés / 30 octobre : 30 tués, 81 blessés, 1 disparu / 31 octobre : 2 tués, 6 blessés, 2 disparus / 1er novembre : 4 tués, 3 blessés / 25 novembre : 33 tués, 80 blessés, 103 disparus / 21 décembre 1914 : 13 tués, 29 blessés). Le 17 novembre 1914, un soldat du 107e R.I. est condamné par la Conseil militaire à 5 ans de prison pour abandon de poste. Le 25 décembre 1914, le Conseil de guerre de la 23e D.I. condamne à des peines de prison un soldat du 107e R.I. pour outrages et un caporal pour abus de confiance. Le 17 février 1915, le Conseil de guerre condamne un soldat pour homicide par imprudence à un jour de prison et un autre pour refus d’obéissance à un an de prison ; un autre est acquitté de l’accusation d’abandon de poste. Le 12 mars 1915, le Conseil de guerre condamne 7 soldats pour refus d’obéissance ou abandon de poste. Début avril 1915, le 107e R.I. est envoyé en Lorraine, entre Commercy (Meuse) et Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moselle), au nord-ouest de Nancy, et plus précisément entre Thiaucourt-Regnéville, Fey-en-Haye et Griscourt/Villers-en-Haye/Rogéville (Meurthe-et-Moselle). Le 28 mars 1915, 3 soldats du 107e R.I. sont condamnés à des peines de travaux publics pour désertion, refus d’obéissance et voies de fait envers supérieurs. (5 avril 1915 : 5 tués, 36 blessés / 6 avril : 16 tués, 89 blessés, 1 disparu / 7 avril : 12 tués, 82 blessés / 14 avril : 3 tués, 27 blessés.
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Le 24 avril 1915, selon le Journal des Marches et Opérations du 107e R.I. :
"Ordre de la 23e D.I. prescrivant que le 107e en entier assistera à l’exécution des soldats Voisin du 63e et Cornuwaël du 107, condamnés à mort par le conseil de guerre en date du 28 mars. Le 107e assurera l’exécution du jugement à proximité de Griscourt. La parade d’exécution a lieu à 16 heures, à 800m au N.E. de Griscourt ; puis les 3 Bataillons regagnent leurs cantonnements. (…) Soldat Cornuwaël Julien Arthur, du 107e Infanterie, coupable de refus d’obéissance lorsqu’il était commandé pour marcher contre l’ennemi, condamné à la peine de mort avec dégradation militaire."
Griscourt (Meurthe-et-Moselle) se situe à l’est de la Moselle, quelques kilomètres au sud de Pont-à-Mousson.
Le 17 mai 1915, le Conseil de Guerre de la 23e D.I. acquitte 2 soldats jugés non coupables de désertion et condamne 4 soldats pour désertion ou abandon de poste ; ces 4 soldats sont affectés au 138e R.I.
Le 28 mai 1915, le Sergent aide-vaguemestre Piquemal du 107e R.I. est cassé de son grade pour fautes graves dans son service spécial.
Le 16 juin 1915, le 107e R.I. embarque à Foug (à l’ouest de Toul) : il débarque à Amiens (Somme) le lendemain et est dirigé au nord de la ville vers Coisy et Rainneville.
29 juin 1915 : "Le Régiment entier assiste à une parade de dégradation des soldats : Bretigne, du 107e, condamné par le Conseil de Guerre à la peine des travaux forcés à perpétuité pour meurtre et Babaud du 107e condamné par le même Conseil de Guerre à la peine de cinq ans de détention pour désertion."
4 juillet 1915 : "Une note au G.Q.G. prescrit d’envoyer en permission de 4 jours (voyage non compris) 12 % de l’effectif."
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